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On a pris tous ses glands pour nourrir les cochons, Papa, mon petit papa, grâce à toi je sais que les banquiers auront toujours tort, que les assureurs vivent de nos plus bas instincts, que seuls les risques existentiels nous catapultent vers nous-mêmes. Guidé par lexemple de tes turpitudes, je vais pouvoir me livrer aux miennes sans craindre que la foudre ne me tombe sur la tête. Aujourdhui je renoue, enfin, avec la gaieté et les fringales qui me secouaient l'âme à quatorze ans. Certes, tu n'étais pas un homme heureux d'être né; cependant ton désespoir chronique, si pudique, n'arrivait pas au bout de ta joie viscérale, ensorcelante. Tu ne croyais pas aux passions perpétuelles, mais tu n'acceptais pas que les tiennes déclinent. Toujours ta conduite démentait ton pessimisme, comme si tu avais jugé inconvenant, et indigne de toi, de tolérer les petitesses de notre condition. Mais le reste, loin dêtre laid, Çui-là toucha son but Voyez, me dit Maximilien à voix basse, quelle superbe bague de diamants madame de Bréant a au doigt et de quels yeux le docteur Wickson la regarde… Elle refuse de lui donner la main… Bien! cest sage. Par quoi te laisses-tu importuner alors que jattendais ton souffle sur mon dos? En achevant ces mots, il sortit accompagné de son escouade dagents qui entouraient le prévenu. Comment as-tu pensé à ça ? Il est des jours où Cupidon sen fout Des bricoles. Que ton parrain avait fait les stups, la brigade des jeux… Qudes longs serments Cupidon sen fout Collés sur un tête dhareng saur Sur ton front qui voyage, Et pourquoi catastrophe, crétin de soldat ? Krasny intervint, mais dune voix où la condamnation était déjà mieux formulée: Les samedis soir, le Zubial se mettait en tenue de danse, entendez quil enfilait un étrange costume constitué dune chemisette en peaux de chat tannées par ses soins et d'un immense caleçon qui lui faisait une manière de jupette; puis il enfilait des sabots. Ainsi accoutré, il allumait la télévision et quand, par la grâce de l'ORTF, surgissait l'image de Claude François, il se mettait à danser comme un diable, en imitant le blondinet désarticulé, devant l'assistance médusée. Trente secondes plus tard, tout le monde dansait devant la télévision! Les invités, ma mère, ses amants, la bonne qui râlait, quelques maîtresses égarées et les enfants! Et en cadence! La gaieté s'emparait de la maisonnée, et nous chantions à tue-tête; puis, échauffé, mon père s'asseyait sur la télé éteinte et nous lisait quelques chapitres de Pagnol, en modifiant un peu le texte original quand l'attention des petits faiblissait. Cest quoi cette cage? a demandé Fanny. Le lendemain, un hélicoptère venu de Djibouti emporta les trois otages relâchés (un couple dAllemands et une coopérante française) et le corps du diplomate mort dans la nuit. Un peu à lécart, nous assistions aux préparatifs. En attendant le départ, les rescapés échangèrent leurs adresses, s'invitèrent à passer des vacances en France et en Allemagne, puis voulurent à tout prix prendre une photo en compagnie des légionnaires. Le corps enveloppé dans une toile de bâche était déjà chargé….